Olinde RODRIGUES
(Benjamin-Olinde Rodrigues-Henriques 1795-1851)

Né le 6 octobre 1795 (14 vendémiaire an 4) à Bordeaux. Docteur es Sciences Mathématiques le 28 juin 1815. En 1817, il demeurait 26 rue de l'Echiquier. Il épousa le 25 octobre 1817 à Paris , Euphrasie Martin (1798),

Mathématicien de valeur, ayant fait des découvertes importantes, il voulut entrer à l'Ecole Normale; sa religion l'en empècha; il entra à l'Ecole Polytechnique comme répétiteur de mathématiques; se résignant alors à devenir courtier à la Bourse, il acquit une grande fortune; il devint directeur de la caisse hypothécaire (dont le directeur était Duveyrier père et le caissier Enfantin). En 1823, le philosophe et économiste Saint-Simon (1760-1825) fit sa connaissance, le convertit à la doctrine nouvelle et reçut de lui le pain quotidien jusqu'à sa mort. Il fut un des disciples les plus dévoués de Saint-Simon qui en mourant lui lègua le soin de continuer son oeuvre.

Le jour des funérailles du maître (le 22 mai 1825), Olinde R. ramena les disciples chez lui pour décider avec eux la fondation d'un journal saint-simonien: ce fut "Le Producteur" (1825-1826) avec cette épigraphe, transcrite de Saint-Simon: "L'âge d'or, qu'une aveugle tradition a placé jusqu'ici dans le passé, est devant nous"; Saint-Simon ne fut mentionné qu'en mai 1826, lorsque Olinde R. lui consacra une série d'études.

Il fonda l'école saint-simonienne, lui attirant d'importantes recrues: son frère Eugène, ses cousins Emile et Isaac Pereire, son ami Gustave d'Eichtal (1804-1886). Il voulut ensuite, avec son frère Eugène, transformer l'école en secte religieuse ; le jour de Noël 1829, Olinde R. s'effaça devant Enfantin (1796-1864) et Bazard (1791-1832).

Il partagea, lui et sa famille, la vie commune des saint-simoniens dans la maison de la rue Monsigny et touchait 200 F pour son entretien. Après la séparation (1831) entre Enfantin et Bazard, Olinde R. suivit Enfantin; il prononça les paroles suivantes: "Au nom du Dieu vivant, qui m'a été révèlé par Saint-Simon, votre ancètre à tous, et le mien en particulier, mon premier acte de foi ici doit être de proclamer vous, Enfantin, l'homme le plus moral de mon temps, le vrai successeur de Saint-Simon, le chef suprème de la religion saint-simonienne". Depuis le 28 novembre 1831, il assurait la gestion financière de la société .

Le 17 février 1832, il se brouilla avec Enfantin officiellement à propos des théories de celui-ci sur la famille, en réalité à cause des propos qu'Enfantin tint sur sa femme. Constant relate en 1832 qu'Olinde n'était plus saint-simonien. Alexandre Dumas (Mémoires, volume 5, p 53) parle de l'arrestation d'Enfantin et d'Olinde Rodrigues, le 22 janvier 1832.

En 1840, il essaya de fonder une revue avec la collaboration d'Adolphe Blanqui, Fournel et Michel Chevalier et il publia les "Poésies sociales des ouvriers", pour montrer à la bourgeoisie combien d'idées généreuses on trouvait chez les prolétaires.

En 1848, il soutint vivement la République et recommanda la participation des ouvriers aux bénéfices; il rédigea un projet de "Constitution Populaire" ("tout pour le peuple et par le peuple"). Ses derniers jours furent occupés à grouper les sociétés de secours mutuels et à préparer une biographie de Saint-Simon (celle que Hubbard a écrite et publiée en 1857). On lui a atribué sans motif "Maria Stella", pamphlet contre Louis Philippe.

Malgré le prestige qui revenait au confident de Saint-Simon, son influence diminua beaucoup; l'autorité lui manquait; sa parole brusque, ses emportements dans la discussion blessaient ses interlocuteurs. Sentant cette infériorité, il en souffrit beaucoup. Il entreprit de publier les "œuvres complètes de Saint Simon" (in 8) dont il ne parut que 2 volumes. Il lègua à sa mort ce projet d'édition à son ami G. Hubbard.

C'était le grand homme de la famille; à la fois mathématicien de valeur et philosophe, il initia sa sœur Amélie au saint-simonisme: "Chaque homme doit avoir un métier manuel". Il habitait 123 boulevard Pereire à Paris. Mort le 17 décembre 1851 à Paris des suites d'un accident stupide. Enterré au Père-Lachaise

Voici son portrait

Ecrits:
* "De l'Attraction des sphéroïdes", thèse de sciences, Paris, le 28 juin 1815
* "Théorie de la caisse hypothécaire", 1820
* "Appel", Religion saint-simonienne, cérémonie du 27 novembre 1831 suivi d'une "Prédication", par le père Barrault
* "Olinde Rodrigues aux Saint-Simoniens, "Bases de la loi morale proposées à l'acceptation des femmes", 13 février 1832
* "Le Disciple de Saint-Simon aux Saint-Simoniens et au public", Signé: Olinde Rodrigues, chef de la religion saint-simonienne,
13 février-1er mars 1832
* "Note sur le mariage et la famille", contenu dans: "Religion saint-simonienne. Morale. Réunion générale de la famille", 1832
* "Religion saint-simonienne. Morale. Réunion générale de la famille",
contenant les "Enseignements du Père suprême" (Par M. Enfantin) et "Les trois familles" (Par M. Olinde Rodrigues), 1832
* "Religion saint-simonienne. Olinde Rodrigues à M. Michel Chevalier, rédacteur du Globe", 1832
* "Olinde Rodrigues aux Saint-Simoniens. Bases de la loi morale proposées à l'acceptation des femmes", 13 février 1832
* "De l'Organisation des banques à propos du projet de loi sur la Banque de France", 1840
* "Les Peuples et les diplomates. La Paix ou la guerre", 18 septembre 1840, Suivi de "Impressions de lecture et souvenirs littéraires d'un inconnu"
* "Poésies sociales des ouvriers", 1841 réunies et publiées par Olinde Rodrigues
* "De l'Organisation du suffrage universel, proposition d'un nouveau mode électoral", 1848
* "Organisation du travail, association du travail et du capital", 1848
* "Organisation du travail, bases de l'organisation des banques", 1848
* "Paroles d'un mort", 1848, Appel aux électeurs, extrait d'un écrit portant ce titre
* "Projet de constitution populaire pour la république française", suivi de projets de lois organiques sur la constitution des
banques, l'association du capital et du travail, et le mariage, et de développements sur la Bourse et la crise financière, et sur les
droits politiques des femmes, 1848
* "Avis aux travailleurs des deux sexes", 1848
* "Elections. Aux citoyens électeurs", 1848
* "Aux électeurs"
* "Aux membres du club central de l'organisation du travail"
* "Avis aux électeurs sur la moralité à rechercher dans les candidats"

Olinde Rodrigues-Henriques est connu comme mathématicien sous le nom d'Olinde Rodrigues. Il est l'auteur de la formule de Rodrigues (représentation intégrale des polynomes de Legendre) publiée en 1816 dans le "Mémoire sur l'attraction des sphéroïdes" dans "Correspondance de l'Ecole Royale Polytechnique", tome 3 [à ce sujet, voir E.W. Hobson, "The theory of spherical and ellipsoidal harmonics", Cambridge University Press, 1931];
____________________
Note: Noter que le savant Cosinus s'est fait connaître par son "Mémoire sur l'équilibre des corps en mouvements" (couronné par l'Académie Somnifère de Saint-Rémy sur Deule) et que son chien s'appelle "Sphéroïde".
____________________

il y a aussi une formule d'Olinde Rodrigues en mécanique. Il écrivit en 1840 un papier sur les rotations.

Le Journal de Mathématiques Pures et Appliquées de 1836 contient trois articles d'Olinde:
* Sur le nombre de manières de décomposer un polygone en triangles au moyen de diagonales.
* Sur le nombre de manières d'effectuer un produit de n facteurs.
* Démonstration élémentaire, et purement algébrique, du développement d'un binome élevé à une puissance négative ou fractionnaire.

Un colloque sur Olinde RODRIGUES a été organisé le 1er décembre 2001 à l'Imperial College de Londres conjointement par "The London Mathematical Society" et "la Société Mathématique de France". On en trouvera le détail en cliquant ici.

Un livre est paru en 2006 intitulé "Mathematical and Social utopias in France. Olinde Rodrigues and his times". C'est un ouvrage collectif de 9 auteurs, sous la direction des Professeurs Simon Altmann et Eduardo L. Ortiz. C'est une édition commune de l'American Mathematical Society et de la London Mathematical Society.

Nous avons organisé le 2 juin 2006 un mini-colloque pour présenter ce livre, à la Bibliothèque de l'Arsenal à Paris. Trois des auteurs étaient présents et ont pris la parole ainsi que des membres de notre "Nébuleuse". L'Acadmie des Sciences nous avait accordé son patronage et deux de ses membres étaient présents ainsi que de nombreux descendants Rodrigues-Henriques.

Enfin, je ne résiste pas au plaisir de vous citer -en anglais - un texte trouvé sur Internet à l'endroit suivant:

171. Students are not taught that British crystallographer, S. L. Altman wrote of the "Scandal" involving the ignoring of öne of the greatest mathematical discoveries in the nineteenth century", particularly the contribution of Olinde Rodrigues.
172. Students are not taught that Olinde Rodrigues published an 1840 "spinor-type formula", treated transformation groups before Jordan, Klein, and Lie; created a differential equation form generating various ORTHOGONAL FUNCTIONS; and developed a critical formula of ANALYTICAL MECHANICS.
173. Students are not taught that Rodrigues is so little known and understood in MAINSTREAM MATH that Elie Cartan (credited with THE SPINOR) wrote about two different mathematicians name "Olinde" and "Rodrigues"; and his name is often misspelled in the literature.
174. Students are not taught that Rodrigues became patron and financial supporter of Count Louis Saint-Simon, founder of the French Socialist Party, and later succeeded him as its head.

Si après cela, vous n'êtes pas convaincu que notre cousin Olinde est un grand homme, alors j'y perds mon latin.


D'où viennent les prénoms des enfants d'Isaac RODRIGUES-HENRIQUES?

----
Olinde (1795) et Sophronie (1797)
Personnages d'un épisode de la « Jérusalem délivrée » du Tasse:
Olinde et Sophronie sont sauvés du bûcher par Clorinde.
Louis-Sébastien Mercier (en 1772) et La Harpe (en 1774) en ont tiré des tragédies, et Paër un opéra (inachevé).
J.J. Rousseau traduisit en 1781 l'épisode d'Olinde et Sophronie.
Dans la «Jérusalem conquise », le Tasse supprima l'épisode « d'Olinde et Sophronie qu'il jugeait trop érotique ».
----
Anaïs (1801)
Principal rôle féminin de l'opéra «Anacréon chez Polycrate», de Grétry, représenté en 1797 à Paris:
Anaïs, fille du tyran Polycrate, et secrètement mariée au roturier Olphide, est sauvée de la colère de son père par le poète Anacréon, de passage à Samos.
----
Herminie (1805)
Personnage de la «Jérusalem délivrée» du Tasse.
Le dictionnaire des Œuvres indique:
«Tandrède, blessé, est soigné par Herminie, douce jeune fille sarrasine qui l'aime en secret et qui, déjà une autre fois, avait tenté inutilement
de le rejoindre pour le secourir».
Dans la «Jérusalem conquise», le Tasse supprima «l'épisode d'Herminie chez les pasteurs qui convenait peu à la dignité de l'œuvre».
- ---
Eugène (1807)
Pas de référence littéraire.
----
Mélanie (1809)
Personnage principal d'un drame de La Harpe,
«Mélanie, ou la Religieuse forcée» (1770), qui ne fut joué qu'en 1791.
----
Félicie (1811)
Aussi. Personnage de «La Belle et la Bête».
----
Amélie (1813)
Pas de référence littéraire.